mardi 3 mars 2009

la laideur en héritage


Il y a des sites, on ne sait pourquoi, on a beau détruire et refaire c'est toujours la laideur qui l'emporte.
Je crois que la Peak Tower de Hong Kong fait partie de ce type de lieu.
Voyez ce Peak Tower restaurant. C'est laid non ?
Je veux dire c'est grotesque et même risible. Une mauvaise architecture qui tangue entre un James Bond sans budget et un décor pour la série des thunderbirds que j'adorais enfant. Vous me direz c'est déjà pas mal. Oui.
Mais non.
Je peux accorder facilement mon dégoût à ma nostalgie si nécessaire, parfois même je m'y roule mais là franchement. C'est quoi ?
Un morceau de cargo posé sur pilotis ? un nécessaire de toilette agrandi ?
Remarquez, on n'oublie pas facilement ce genre de construction.
Et puis arrive l'argent et Terry Farrell architecte, on détruit le moche et on construit... le moche !
Là le registre c'est bouchon de flacon de parfum à deux balles. Épouvantable...
Comment faire aussi raté ?
Ça veut tellement pas faire comme tout le monde, ça veut tellement faire moderne que c'est une vraie tartufferie. c'est le Futuroscope sans l'humour, c'est le coup de compas qui ne se discute pas, c'est clinquant. je crois que si on met le pied dedans ça peut porter bonheur non ?
C'est typiquement ce genre de truc qui dégoûte de l'architecture contemporaine. C'est un bidule, un machin, c'est dessiné en deux secondes sous une influence fromagère.
la commande devait être simple : la même chose mais moderne. C'est réussi c'est la même chose mais moderne mais laide.



Palace


C'est pour ce genre de rencontre que je continue à fouiller dans les boîtes à chaussures.
Voici le Riyadh Palace Hotel.
Je n'ai pas beaucoup de renseignements, franchement rien. Mais c'est vraiment un dessin que j'aime. Un cylindre central aveugle articule deux barres écrans aux vitres fumées comme des lunettes de soleil de contre-bande. Ce marron foncé est si daté...
Puis, à chaque extrémité à nouveau deux cylindres ajourés à peine, presque une architecture de défense, des meurtrières. Les escaliers de secours sans aucun doute. C'est brutal et franc comme construction et comme dessin. On aimera également les pilotis très élevés et de base carrée comme si on n'avait pas fini de descendre la façade jusqu'au sol. La structure ici se donne à voir.
Pas de débauche de matériaux luxueux, pas de marbre en fine feuilles sur la surface. Le luxe se cache ailleurs, dans un service impeccable, une attention discrète au client. Du moins j'imagine.
J'imagine le silence des pneus des énormes limousines glissant sur un parvis ombragé.
J'imagine.
Ce bâtiment pourrait être une sous-préfecture, un centre bancaire, un palais de justice n'importe où.
Il baigne pourtant dans un air surchauffé en Arabie du Sud.
International.
La carte postale n'est pas datée, elle nous indique : Saudi Hotel Services Company. Riyadh palace Hotel P.O box 2691 Riyadh Saudi Arabia telephone 4012644 telex 200312 Kasser SJ
Si vous vouliez y réserver une chambre...

axe majeur plié


J'aime les livres à systèmes que l'on appelle parfois pop-hop.
J'aime l'architecture.
J'aime les villes nouvelles.
J'aime la sculpture contemporaine.
Donc : j'aime ce livre que je reçois ce jour.
Etrange publication éditée par l'Etablissement Public d'Aménagement de Cergy-Pontoise en 1992, ce livre se déploie et nous donne à voir, à la manière de nos livres d'enfance, l'Axe Majeur dessiné par Dani Karavan à Cergy-Pontoise.
Il s'agit certainement là encore d'un ouvrage promotionnel. C'est en tout cas un bel objet éditorial mettant en balance à la fois la monumentalité de l'œuvre et la fragilité extrême du livre à systèmes.




 
Déplié on est en avion au dessus de 1m (!) de paysage. C'est tout bonnement spectaculaire. Je connais mal l'œuvre de Dani Karavan, je veux dire de visu (de visée).
Pourtant Cergy n'est pas loin. ma visite de son site me permet de comprendre un peu mieux son univers formel très orienté vers des bases géométriques alliant puissance, cheminement, point de vue et monumentalité.
Il fait des monuments. Moins des sculptures. 
Il me faudra parcourir cet Axe Majeur bientôt.


Je trouve dans ma collection bien rangée maintenant une carte postale de Cergy-St-Christophe nous montrant un coucher de soleil sur l'Axe Majeur. Cette carte lyna est une photographie de Paul Viard qui a su mettre en scène l'inscription astronomique de l'œuvre de Karavan. Nous sommes sur la trace des Aztèques, des Indes ou encore de Stonehenge ou la cosmogonie rejoint l'espace sous les pieds. Impressionnant. Il me faudra vérifier si cet alignement céleste et terrien a lieu tous les jours et à quelle heure...


En attendant je tente une reconstitution où le soleil est une lampe de poche.
Je vous rappelle que l'architecture est de Ricardo Bofill. Il semble que là, dans cette rencontre avec Karavan un ensemble incroyable d'influences se soient rencontrées : le jardin à la française (à l'italienne donc) revisté façon New-Age dans une remarquable piste d'atterrissage pour soucoupe volante.
Mais je suis trop sarcastique peut-être et je ne suis pas certain de savoir quoi faire de ce genre de travail, à la fois remarquablement spectaculaire et grandiose et totalement épuisé par justement ce trop grand sens d'une métrique spirituelle qui m'exaspère un peu. Comme on disait dans les années 80 : too much. Mais reste l'incroyable monument à Walter Benjamin en Espagne et le magnifique monument aux morts de la Brigade Neguev à Beersheba.
www.danikaravan.com/ 

http://www.cergypontoise.fr/sortir/axemajeur/site.php