mardi 19 novembre 2013

Hyper Shogun


Hyogensha Co. éditions.


Revenir à Kyoto, parce que je n'y suis jamais allé...
Que par les images sur des cartes postales.
Le Kyoto International Conference Hall est bien ce genre de machine devant laquelle je me prosterne. Le béton brutaliste reprend pourtant ici l'héritage formel d'une architecture traditionnelle et c'est dans ce choc d'échelle et de composition que je trouve la plus belle expression de ce matériau capable d'envoyer des images dont la solidité résiste à mon étonnement.
Tout le Japon est là dans ce mélange d'une force sans retenue, même violente, sans concession et dans une subtilité presque tendre à l'esthétique impeccable. Un peu, comme la beauté effrayante, d'un Katana parfaitement aiguisé.
Ça fait mal bien.
Hyper dessiné, hyper tendu, hyper solide, hyper amoureux de son temps et de son histoire l'architecture de Sachio Otani me semble exister depuis des siècles et pour le reste des siècles alors que nous sommes sur une terre qui tremble et dont l'impermanence des formes fonde souvent la beauté.
Sachio Otani, l'architecte de cette merveille est aussi présent dans la collection de cartes postales trouvées par Claude Lothier et toutes adressées à Monsieur Alexandre Persitz dont on sait l'importance pour la revue Architecture d'Aujourd'hui.



Mais étrangement, peu de réalisations de cet architecte japonais ne figurent dans la revue, sauf un article publié en 1951 mais, qui pour une fois, manque à ma collection.
Alors je vous donne cette carte postale reçue par Monsieur et Madame Persitz et expédiée en 1972. On s'amusera surtout dans ce petit texte de la première question posée par la correspondante
 : "Do you agree ?"
Je laisse la famille de Monsieur Persitz nous révéler qui est ce Ysa ? Yra ?
Nous restons persuadés que la réponse à cette question posée à Alexandre Persitz devant l'œuvre de son confrère japonais fut positive.

lundi 4 novembre 2013

Trente tonnes



Daniel attendait la commande debout dans son costume.
Il essayait de rester à l'écoute des désirs de ses deux clientes mais, comme à son habitude, ses pensées vagabondaient. Enfin, il avait pris cette habitude depuis qu'il avait assisté à l'aménagement du nouveau Relais Top de Morainvilliers et qu'il avait discuté avec l'un des décorateurs.
Ce dernier avait ri aux éclats lorsque Daniel l'avait appelé ainsi et lui avait dit qu'il n'était pas décorateur mais designer. Ce mot avait sonné chez Daniel comme un objet précieux et exotique, quelque chose d'américain, de sérieux et de solide.
"une salade du chef avec une Evian"
"...et moi un plat du jour sans frites avec un Orangina"
Mais Daniel n'avait pas entendu.
Les gloussements des deux clientes le réveillèrent un peu mais surtout le sermon de la patronne, Madame Yvette qui était la nouvelle et fière propriétaire du Relais Top qu'elle avait voulu "dans l'esprit des Motels américains que j'ai vus l'an dernier pendant mon voyage aux chutes du Niagara."
Lampes blanches sur fine structure de métal brossé, faux plafond à vagues et grille géométrique avec des spots, sièges en moleskine imitant ceux des automobiles de sport et surtout "beaucoup de blanc, même si c'est salissant, c'est jeune et lumineux."
Daniel reprit son service, rangea à vingt-trois heures sa tenue dans le minuscule placard. Il y rangea aussi son rêve.
De toute manière, au printemps, il partait pour Metz faire son service militaire.
C'est là, qu'il apprit avec une certaine froideur que Madame Yvette fut écrasée par un Berliet de trente tonnes alors qu'elle expliquait sur le parking à sa future belle-fille combien l'architecture de son Relais-Top était moderne.

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